IRSN/ASN : « Un système totalement désorganisé en vue » (François Jeffroy, IRSN)
« S’il y a un rapprochement entre l’IRSN
Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire
et l’ASN
Autorité de sureté nucléaire
, on peut mutualiser l’informatique ou le patrimoine. Sur la recherche et l’expertise, je pense que cela serait plus insidieux et plus dans le temps. Mais une chose est sûre : la conséquence immédiate de cette mutualisation va totalement désorganiser le système », déclare François Jeffroy, représentant de l’intersyndicale à l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire
L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire est spécialisé dans la recherche et les expertises relatives aux risques nucléaires et radiologiques• Création : 2002• Missions d’expertise et de…
, à News Tank le 16/02/2023.
Plusieurs représentants des syndicats de l’institut sont reçus par Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique, le 17/02/2023. Au programme des discussions : la décision du Gouvernement de transférer les compétences de l’IRSN vers l’Autorité de sûreté nucléaire, annoncée le 08/02/2023.
François Jeffroy répond aux questions de News Tank.
Pourquoi dites-vous qu’il est vital de ne pas mutualiser les compétences de l’IRSN Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire avec celles de l’ASN Autorité de sureté nucléaire ?
Il y a au moins trois raisons. La première tient à la robustesse du système actuel qui distingue le temps, l’espace et la culture de l’expertise de la décision politique. L’ASN est un est un acteur politique qui autorise ou n’autorise pas. Il est important que ces deux temps soient distingués pour permettre de formuler un avis fondé sur la technique et la science et qui, ensuite, sert à prendre une décision qui, bien évidemment, intègre les dimensions sociales économiques environnementales ou encore internationales.
La fusion avec l’ASN compliquera nos relations avec d’autres clients »La deuxième raison tient au fait que la fusion avec l’ASN va compliquer nos relations avec d’autres « clients ». Nous ne travaillons pas que pour l’ASN, nous collaborons aussi pour la direction générale du travail ou la direction générale de la santé voire pour d’autres directions. Cela risque, in fine, de ne pas être simple.
Le dernier argument : cette distinction entre le temps de l’expertise technique et le temps de la décision est favorable à l’implication des parties prenantes de la société civile. Le fait de mettre sur la table un avis technique et ensuite une décision de politique nécessite que l’avis scientifique soit présenté aux commissions locales d’information. Par conséquent le rapport qui existe entre ces instances et un acteur comme l’IRSN, n’est pas un rapport de même nature.
Aviez-vous connaissance de ce rapprochement avant l’annonce du ministère de la Transition énergétique ?
Personne à l’intérieur de l’Institut n'était au courant, et même au-delà. Depuis, c’est nous qui apprenons à nos interlocuteurs la décision de la ministre.
Quelles sont les conséquences possibles en terme d’emploi ?
C’est compliqué de se projeter puisque nous ne connaissons pas l’organisation future. L’expertise sera-t-elle réservée à l’ASN, la recherche au CEA et l’expertise de défense à l’ASN de Défense ? Les premiers impactés pourraient être les fonctions support de l’institut : la direction de la communication et tous les services des politiques d’ouverture à la société. Ces unités ont des soucis à se faire.
S’il y a un rapprochement, on peut généraliser l’informatique ou le patrimoine. Sur la recherche et l’expertise, je pense que ça sera plus insidieux et dans le temps. Une chose est sûre : la conséquence immédiate de cette mutualisation va totalement désorganiser le système.
Plus personne, avec ce rapprochement, n’a envie de postuler à l’IRSN »Les gouvernants, qui veulent relancer le nucléaire et fluidifier les décisions, font tout pour que cela se passe mal, que nous ne soyons plus en capacité de répondre aux demandes. Et plus personne aujourd’hui, avec cette annonce de rapprochement, n’a envie de postuler à l’IRSN. J’invite par ailleurs les Français à lire un rapport du député Jean-Yves Le Déault de 1998, commandé par Lionel Jospin, Premier ministre de l’époque, qui indique les exigences à prendre en compte pour créer l’IRSN. Une des conditions était « égalité de risque et égalité de traitement » entre les installations qui relèvent de la Défense et celles qui relèvent du civil.
Lors de la création de l’IRSN, l’expertise couvrait tout type d’installations. Il y a désormais une forte probabilité pour que les experts en charge du civil aillent à l’ASN et que les experts en charge des installations de la Défense partent à l’ASN de Défense.
Qu’attendez vous de votre rencontre avec la ministre de la Transition énergétique le 17/02/2023 ?
Joker, vous comprendrez que je ne peux vous en toucher un mot avant cette rencontre au ministère.

François Jeffroy
Directeur du laboratoire de recherche en sciences humaines et sociales @ Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)
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Parcours
Directeur du laboratoire de recherche en sciences humaines et sociales
Chef du service d’expertise facteurs organisationnels et humains
Chef de projet sur l’évaluation de sûreté d’installations de recherche
Chef de projet sur l’évaluation de sûreté de la salle de commande informatisée du nouveau réacteur EDF
Fiche n° 48577, créée le 16/02/2023 à 11:03 - MàJ le 16/02/2023 à 11:13
Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)
L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire est spécialisé dans la recherche et les expertises relatives aux risques nucléaires et radiologiques
• Création : 2002
• Missions d’expertise et de recherche dans :
- la sûreté nucléaire
- la sûreté des transports de matières radioactives et fissiles
- la protection de l’homme et de l’environnement contre les rayonnements ionisants
- la protection et le contrôle des matières nucléaires
- la protection des installations nucléaires et des transports de matières radioactives et fissiles contre les actes de malveillance
• Effectifs : 1 725 collaborateurs
• Budget : 282 M€
• Présidente : Marie-France Bellin
• Directeur général : Jean-Christophe Niel
• Contact : Pascale Portes, responsable média
• Tél. : 01 58 35 70 33
Catégorie : Formation - Recherche
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Fiche n° 13600, créée le 03/06/2022 à 16:48 - MàJ le 07/03/2023 à 12:06