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COP28 : « Sécuriser la quantité de base énergétique pour tripler les EnR en 2030 » (M. Chebbo, Univers)

News Tank Energies - Paris - Débrief n°308646 - Publié le 08/12/2023 à 14:00
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E-Debrief du 06/12/2023 avec Maher Chebbo - ©  News Tank

« Si les 195 pays présents à Dubaï qui négocient arrivent à se mettre d’accord sur un triplement des EnR Énergies renouvelables , c’est-à-dire 11 000 GW Gigawatt en 2030, c’est une bonne décision », déclare Maher Chebbo Directeur général Europe @ Univers
, directeur général Europe d’Univers Entreprise spécialisée dans les technologies de l’AIoT pour accélérer les progrès vers un avenir net zéro carbone (ex-Envision digital)• Missions : - Fournisseur de solutions pour la production… , lors du E-Debrief énergies organisé par News Tank le 06/12/2023.

« Et il faut le faire avec un accompagnement de la sécurisation de la quantité de base énergétique nécessaire. Cette quantité de base complétée par une très grosse quantité d'énergie renouvelable, à terme estimée à 80 %, nous permettra de continuer à fonctionner. Si demain on dit on arrête tout, il n’y a plus d’hydrocarbure, même pas de nucléaire, et que nous faisons uniquement de l'énergie intermittente, on aura de gros problèmes ».

Maher Chebbo était en direct depuis Dubaï (Émirats arabes unis) où se tient la COP28 (du 30/11 au 12/12/2023).

Pendant la COP28, Maher Chebbo a participé aux groupes de travail du Conseil des ingénieurs pour la transition énergétique et de l’Irena (Agence internationale pour les énergies renouvelables L’Agence internationale pour les énergies renouvelables est une organisation intergouvernementale dont la mission est la promotion des énergies renouvelables à l'échelle mondiale • Création … ).

« Sur l’issue de cette COP28, je pense qu’il en sortira un accord avec de nouveaux objectifs parce que les populations sont plus vigilantes maintenant et vraiment sceptiques. Pour rendre cette transition enthousiasmante, il faut faire participer les individus, les entreprises, bref tous ceux qui doivent faire quelque chose. Cela deviendra l’affaire de chacun. »

News Tank rend compte des échanges.


Une COP pas comme les autres

  • « La COP28 est différente des précédentes. D’abord dans la façon de naviguer, les organisateurs ont utilisé l’Exposition universelle de 2020 pour la transformer en COP Conférence des parties . Les Émirats arabes unis ont l’habitude toujours de faire des choses très impressionnantes. On l’a vu avec la Coupe du monde au Qatar aussi dans le Golfe, ils veulent que cela soit le plus réussi possible, la meilleure COP au monde… En fait, ils veulent être impressionnants malgré le fait qu’ils sont parmi les pays les plus producteurs de pétrole au monde. Dans les décisions à venir, il y a actuellement un débat sur ce qu’on appelle la baisse ou l'éradication du pétrole et des hydrocarbures dont on a besoin aujourd’hui.
  • Si les 195 pays présents à Dubaï qui négocient arrivent à se mettre d’accord sur un triplement des énergies renouvelables, c’est-à-dire 11 000 GW Gigawatt en 2030, c’est une bonne décision. Et il faut le faire avec un accompagnement de la sécurisation de la quantité de base énergétique nécessaire, le “base load” en anglais. Cette quantité de base complétée par une très grosse quantité d'énergie renouvelable, à terme estimée à 80 %, nous permettra de continuer à fonctionner. Si demain on dit on arrête tout, il n’y a plus d’hydrocarbure, même pas de nucléaire, et que nous faisons uniquement de l'énergie intermittente, on aura de gros problèmes. Et il y a aussi des process industriels qui ont besoin de gaz, par conséquent tout ne peut pas être électrique. Ce gaz devient du biogaz et peut permettre à des process industriels de continuer à fonctionner, surtout dans l'énergie intensive.
  • Et on ne fera pas la transition écologique sans la technologie. En utilisant les nouvelles technologies dans tous les domaines, il faudra faire attention à la consommation d'énergie qu’elles nécessitent, notamment les data center dont les émissions ont été multipliées par deux ou trois en 15 ans. Sans oublier que le nucléaire ou l’hydraulique font partie des solutions car il faut une base énergétique suffisante, conséquente et centralisée de production d’énergie décarbonée. »

Vigilance sur les annonces des COP Conférence des parties

  • « Au fil des années, les gens, à juste titre, sont de plus en plus vigilants sur les annonces des COP. Les populations, et c’est normal, veulent des résultats concrets et un bilan de ce qui est annoncé. Des instruments de mesure pour savoir où nous en sommes sont à trouver du côté de l’efficacité énergétique.
  • L’objectif d’ici 2030 est de doubler chaque année les points d’efficacité énergétique, c’est à dire passer de 2 % à 4 %. Aujourd’hui, chacun peut dire ce qu’il veut, mais il faut de la technologie pour mesurer exactement combien nous consommons d'énergie pour pouvoir mesurer l’efficacité. Idem sur les émissions carbone. Donc il faut partir de points de mesure avec de la technologie et faire un suivi pour savoir qui a exécuté et qui ne l’a pas fait encore. In fine, il faut avoir un reporting qui n’est pas retravaillé, non manipulé par des chiffres. Ces chiffres doivent être neutres, provenir d’organismes indépendants, et non de tel ou tel pays.
  • Ce sujet du bilan chiffré est assez nouveau dans les discussions ici à la COP28. J’ai participé le 05/12/2023 en présence Francesco La Camera, directeur général de l’Irena, à un bilan d’étape sur les émissions de gaz à effet de serre. 
  • Les industriels, qui représentent 30 % des émissions mondiales, veulent réduire leurs émissions et affichent leurs ambitions dans le déploiement des EnR et sur le financement. Un point a manqué pendant cette réunion, que j’ai soulevé : si Arcelor-Mittal, Tata ou d’autres industriels électro-intensifs veulent réduire leurs émissions, il faudra mesurer ces évolutions très concrètement dans le temps. Et il faut aussi le certifier le niveau des émissions et celui des installations renouvelables mises en place. Le suivi concret est essentiel si l’on veut atteindre des objectifs.
  • Si réglementairement parlant, ce suivi existe déjà, il faut y ajouter des outils sinon cela ne fonctionne pas. Si je prends un exemple en France de l’efficacité énergétique aujourd’hui, des CEE Certificats d'économie d'énergie sont donnés comme aides. Quand vous faites des projets, vous mettez en place de la technologie comme la gestion technique des bâtiments. Là, on vous force à mesurer le niveau où vous êtes aujourd’hui et ensuite on vous suit quand vous avez des contrats de performance énergétique, c’est-à-dire que vous vous engagez à réduire de 20 % votre consommation d'énergie par rapport à aujourd’hui. On vous suit et on vous donne de l’argent par rapport à votre engagement. Ces outils-là doivent être généralisés. »

« Misons sur les industriels pour éclairer les prises de décisions des décideurs et diplomates »

  • « L’Irena, qui a plus de 180 États membres, a constitué un groupe industriel avec 63 sociétés comme Envision & Univers, Siemens, ArcelorMittal et des industriels et énergéticiens. Il n’y a pas de régulateurs, ni des diplomates.
  • Idem au sein du Conseil des ingénieurs pour la transition énergétique des Nations Unies autour d’António Guterres, où je suis membre également et qui m’invite ici. Nous sommes 40 membres issus du monde des ingénieurs, des scientifiques et du monde académique de haut niveau. Seuls les points de vue des scientifiques et des ingénieurs sont mis en avant.
  • Le Conseil des ingénieurs pour la transition énergétique (CEET) doit être indépendant pour pouvoir donner des recommandations qui sont bonnes pour l’environnement et pas bonnes pour telle et telle société. Notre objectif est de recommander, d’apporter des solutions et idées concrètes à ceux qui prennent finalement les décisions et les objectifs.
  • Nous devons apporter des solutions par exemple sur le sujet des matières premières qui sont critiques, avec des batteries électriques qui seront partout d’ici 2035 avec la fin des batteries thermiques pour les voitures thermiques. Le sujet des matières premières est très chaud : comment sécuriser les matières premières pour les batteries ? Il y a 600 personnes à l’UNECE (Commission économique pour l’Europe des Nations unies) et d’autres experts à l’UNIDO (United Nations Industrial Development Organization) qui planchent sur le sujet. Les ingénieurs sont ici à Dubaï pour faire des propositions, qui seront ensuite reprises par ces organisations pour pouvoir ensuite les transformer en décisions, décrets ou régulations. Et la Commission européenne fonctionne de la même façon. De la même façon, quand ils forment des groupes de travail sur les smart grids ou sur les batteries par exemple, ils écoutent des experts pour traduire tout cela en financement de projets innovants et en les transformant en mandats et en décrets. »

« Nous sommes dépendants de plusieurs secteurs et nous voulons éviter les problèmes sociaux »

  • « Aujourd’hui, 75 % des émissions proviennent de l'énergie. On ne peut pas dire que demain, si on dit on arrête tout, on résout le problème. Aujourd’hui, nous sommes très dépendants dans pas mal de secteurs et nous voulons éviter les problèmes sociaux. On a vu ce qui s’est passé lorsqu’on a augmenté les taxes sur le pétrole à la pompe en France. Il faut opérer une transition en laissant fonctionner la vie courante. Vous ne pouvez pas de jour au lendemain éteindre la lumière. Le monde doit continuer à fonctionner.
  • Après, il faut aussi convertir les gens. Il y a par exemple des banques qui financent des projets  permettant de fermer des mines ou des champs pétroliers et ensuite de former les gens qui t travaillaient pour aller vers les éoliennes ou les panneaux solaires. Donc ça aussi, il faut le faire.
  • Il faut aussi faire en sorte que les technologies ne soient pas plus chères. Si nous prenons par exemple les batteries : la batterie électrique est plus chère celle de la voiture thermique. Est ce que tout le monde peut se permettre de l’acheter ? Non, donc il y a tout un travail aujourd’hui à faire sur l’optimisation des coûts, mais ça ne se fait pas d’un jour au lendemain. Comment optimiser par exemple le coût entre les matières premières, le coût de production des batteries et le coût de consommation énergétique pour, qu’à la fin, donner des batteries à Renault ou à BMW soit, en tarif de véhicule, aussi cher que les voitures thermiques ? Ce n’est pas simple. Cela prend aussi quelques années pour que les prix soient acceptables. »

Le nucléaire pour remplacer le charbon

  • « Le charbon est une source d’énergie qui peut être arrêtée le plus vite possible et il faut aider les pays qui en ont à l’arrêter. Il faut transformer ces centrales de production d'énergie en biogaz, il faut également travailler sur le nucléaire, en triplant la production d’ici 2050. Cela permettra de répondre à pas mal de besoins. Au Moyen-Orient, les Émirats (Abu Dhabi) sont le premier pays à avoir construit avec les Coréens les centrales de production nucléaire pour diversifier et remplacer le pétrole à terme. Mais tous les pays ne peuvent pas se doter de l’énergie nucléaire.
  • Il existe d’autres technologies nucléaires compactes comme les SMR Small Modular Reactor , ces petits réacteurs modulaires décentralisés qui peuvent être installés ici et là, et qui peuvent faire l’affaire. Il y a par conséquent des choses à faire pour aller assez vite également pour remplacer le charbon qu’il faut arrêter le plus vite possible. La course contre le réchauffement climatique ne peut attendre. »

« La nécessité d’accélérer la transition vers des systèmes énergétiques digitaux à faible émission de carbone »

  • « Le directeur général de l’Irena a tout à fait compris qu’il fallait développer des outils digitaux pour les systèmes énergétiques. Les outils digitaux ne sont pas la cerise sur le gâteau. Aujourd’hui, une voiture que vous achetez est un minimum ‘intelligente’. Quand vous installez des énergies renouvelables, il n’y a aucun moyen de les gérer et de savoir ce qui fonctionne selon les conditions climatiques et météorologiques, et selon aussi des autres productions, sans avoir de l’intelligence. On peut aller effectivement très vite dans le déploiement d'énergies renouvelables. On sait le faire.
  • Mon entreprise gère les données de 600 GW d’installations renouvelables. Avec l’intelligence et le numérique, nous captons les données des éoliennes ou des panneaux solaires pour suivre en temps réel s’il y a un incident, et ainsi faire du contrôle commande et des actions pour réduire les coûts de maintenance et garder finalement ces énergies renouvelables compétitives. Nous avons standardisé la façon de déployer des énergies renouvelables intelligentes. Par conséquent, les smart grids sont un vrai levier de décarbonation. »

Les capture de carbone, autre enjeu de la COP28 ?

  • « L’objectif affiché par les experts est de pouvoir augmenter de 2 800 % la capacité de capture du carbone dans le secteur industriel. Au lieu de capter cinq kilotonnes de CO2, on souhaite passer à 14 000 kilotonnes de CO2 capturées. 
  • Sur cette capture du carbone, les pays à la pointe sont les pays nordiques européens, mais aussi les États-Unis. Un groupe de travail au sein de la Commission européenne avec des experts du domaine travaillent sur le sujet depuis une vingtaine d’années. À l’image d’autres technologies qui ont besoin de beaucoup d’énergie pour obtenir un résultat, comme celles liées à l’hydrogène vert ou les batteries, il faut faire un bilan complet. Dès lors que nous savons mesurer les émissions du début jusqu'à la fin, avec un cycle de vie carbone, nous pouvons mesurer l’énergie dont on a besoin pour la capture carbone. »

« Les émissions de CO2 n’ont pas de frontières »

  • « Les pays du Nord ont besoin des pays du Sud. Juste un exemple : les matières premières se trouvent souvent dans les pays comme en Afrique ou en Amérique latine. Donc il ne faut pas juste dire que les pays sont un handicap, ils ont besoin d’aide et après c’est un marché. Quand les gens commencent à consommer, cela devient un marché pour les pays du Nord. Effectivement, quand on parle de changement climatique, on ne parle pas de marché, même si ceux qui sont dans les pays du Nord vont trouver un intérêt sur le côté business.
  • Par conséquent je suis pour que les pays du Nord financent les dommages et les pertes qui sont liées à la crise climatique par exemple. Car plus les gens du Sud vont avoir des problèmes, plus nous aurons également des problèmes. Nous vivons dans un monde connecté. Les émissions de CO2 n’ont pas de frontières. Sur la décarbonation, le monde est connecté. Les pays du Nord ont un devoir : trouver le moyen pour aider et financer les pertes liées aux conditions climatiques, aux crises climatiques des pays du Sud. Ils doivent également en contrepartie coopérer avec les pays du Sud, notamment ceux qui ont des matières premières.
  • Je pense aussi qu’il faudra partager proprement le gâteau des matières premières sur la longueur. C’est-à-dire que quand un pays a du lithium ou de l’uranium, il doit pouvoir aussi s’enrichir et prendre une part du gâteau. »

« Optimiste quant à l’issue de la COP28 »

  • « Sur l’issue de cette COP28, je pense qu’il en sortira un accord avec de nouveaux objectifs parce que les populations sont plus vigilantes maintenant et vraiment sceptiques. Alors que les deux dernières guerres en Europe et au Moyen-Orient créent un climat pessimiste, il faut faire quelque chose de bien et de positif sur la question climatique et la question énergétique. Je suis confiant.
  • Pour rendre cette transition enthousiasmante, il faut faire participer les individus, les entreprises, bref tous ceux qui doivent faire quelque chose. Cela deviendra l’affaire de chacun. »

 

 

 

Maher Chebbo


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Fiche n° 46772, créée le 12/07/2022 à 13:39 - MàJ le 09/11/2023 à 12:32

Univers

Entreprise spécialisée dans les technologies de l’AIoT pour accélérer les progrès vers un avenir net zéro carbone (ex-Envision digital)
• Missions :
- Fournisseur de solutions pour la production intelligente d'énergie renouvelable, l’efficacité de la consommation et le stockage intelligent et flexible
- Optimise les énergies renouvelables intelligentes, les infrastructures urbaines et les solutions de gestion du carbone
Effectif : 800 employés (2022)
Implantation  : Chine, France, Japon, Allemagne, Norvège, Pays-Bas, Royaume-Uni et États-Unis, avec un siège à Singapour.
Directeur général Europe : Maher Chebbo
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Catégorie : Fournisseur


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Fiche n° 13794, créée le 12/07/2022 à 14:08 - MàJ le 22/09/2023 à 16:37

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E-Debrief du 06/12/2023 avec Maher Chebbo - ©  News Tank