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Photovoltaïque : « Se préparer au tsunami du recyclage » (Nicolas Defrenne, Soren)

News Tank Energies - Paris - Interview n°322087 - Publié le 22/04/2024 à 11:40
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©  Soren
Nicolas Defrenne, directeur général de Soren - ©  Soren

« Nous nous préparerons au tsunami qui vient sur le recyclage des panneaux photovoltaïques. En 2014, nous avons collecté 366 tonnes. En 2023, c’était 5 000 tonnes. En 2030, notre objectif est de 42 000 tonnes et en 2050 de 300 000 tonnes », déclare Nicolas Defrenne, directeur général de Soren Soren est l’éco-organisme agréé par les pouvoirs publics pour la collecte et le traitement des panneaux photovoltaïques usagés en France.• Création : 2014, sous le nom initial de PV Cycle France.… , l’éco-organisme chargé d’assurer la collecte et le recyclage des panneaux solaires, à News Tank le 22/04/2024.

« La France est généralement en avance sur les technologies de recyclage. C’est à Saint-Loubès (Gironde) qu’a été inaugurée en 2022 la première usine au monde au stade industriel de délaminage, par Envie 2E Aquitaine. Une autre start-up française, Rosi Solar, travaille sur des techniques pour récupérer le silicium ultra-pur et les autres métaux comme l’argent ou le cuivre. »

« Le recyclage à haute valeur ajoutée, c’est notre cheval de bataille. Je ne peux donc pas me concentrer que sur le poids lors du recyclage, si Silicium je veux parvenir à un bon équilibre technico-économique. Si l’on garde l’objectif actuel de 85 % du poids du panneau à recycler, qui est déjà accepté, que l’on exige en outre d’aller récupérer au moins 60 % de l’argent, et que l’on discute ainsi matière par matière, cela devient intéressant économiquement. Et cela permet notamment de faire en sorte que la France soit en avance sur la chaîne de valeur de recyclage des panneaux. »

Innovation, réglementation, réemploi, éco-conception : Nicolas Defrenne répond aux questions de News Tank.


L’une des missions de Soren est de créer l’écosystème industriel de la collecte et du recyclage des panneaux photovoltaïques. 10 ans après votre création, où en est cet objectif ?

Il se structure et se prépare au tsunami qui vient, avec les panneaux photovoltaïques installés il y a 15 ou 20 ans et qui arrivent en fin de vie ! En 2014, nous avons collecté 366 tonnes de panneaux. En 2023, c’était 5 000 tonnes. En 2030, notre objectif est de 42 000 tonnes, en 2040 de 160 000 tonnes… Et en 2050 de 300 000 tonnes. L’augmentation sera énorme. Mais nous avons le temps de nous préparer.

Comment se situe la France s’agissant de la technologie ?

La France est généralement en avance sur les technologies de recyclage. Il existe deux solutions principales de recyclage : la première est le broyage du panneau suivi d’une séparation des divers matériaux grâce à des aimants, des courants de Foucault, des flottaisons, etc. C’est une filière qui peut augmenter en capacité rapidement, mais elle n’offre pas une pureté optimale des éléments récupérés. Il existe des usines de ce type en France, près de Lille ou de Toulouse.

Première usine de délaminage au monde au stade industriel »

La seconde filière de recyclage est le délaminage, c’est-à-dire le décollage des couches qui constituent le panneau, avant récupération des matières. Comme un panneau doit résister 20 ans sous la pluie et le vent, les couches sont très bien collées et difficiles à désassembler. C’est en France, à Saint-Loubès (Gironde), qu’a été inaugurée en 2022 la première usine au monde au stade industriel de délaminage, par Envie 2E Aquitaine.

Une autre start-up française, Rosi Solar, travaille sur des techniques pour récupérer le silicium ultra-pur et les autres métaux comme l’argent ou le cuivre. Nous avons passé un contrat avec l’usine Rosi Alpes, qui a ouvert en 2023, pour un recyclage de ce type, à haute valeur ajoutée, de panneaux solaires. Nous participons à créer un écosystème industriel. Cela rend la mission palpitante.

Vous plaidez pour un recyclage à haute valeur ajoutée ?

C’est notre cheval de bataille. Le terme de « recyclage » ne veut pas dire grand chose. En effet, la réglementation impose de recycler 85 % du poids du panneau. Or dans un tel équipement, il y a en moyenne 70 % de verre et 13 % d’aluminium. On est déjà quasiment aux 85 %.

Si l’on ne recycle que cela, cela ne coûte pas cher mais on ne prend pas en compte la valeur des matières entrantes dans chaque panneau. En effet, l’argent et le silicium, qui représentent respectivement 0,08 % et 2,9 % du poids, comptent pour 20 % et 40 % de la valeur de la matière entrante. Et ces deux matériaux sont considérés comme critiques par l’Europe.

Recyclage de panneaux photovoltaïques - © Laurent Julliand

Mais ce sont les deux fractions les plus légères du panneau : je ne peux donc pas me concentrer que sur le poids lors du recyclage si je veux parvenir à un bon équilibre technico-économique. Mon but, en recyclant, doit être de créer des matières premières dont d’autres industriels pourront se servir.

L’objectif est à la fois écologique et économique ?

Oui, car l’économie sans l’écologie est délétère, mais l’écologie sans l’économie est très hypocrite. Cela revient à faire payer le coût du recyclage aux consommateurs, aux collectivités, aux autres, via l’éco-participation. Pour changer cela, il faut différencier le coût du traitement et les recettes matière, et jouer sur ces dernières. Augmenter le pourcentage du poids du panneau à recycler, comme le demandent certaines ONG Organisation non gouvernementale bien intentionnées, risque de continuer à pousser à se concentrer sur la masse.

Créer des objectifs de valorisation matière »

Si l’on garde l’objectif actuel de 85 %, qui est déjà accepté, que l’on exige d’aller récupérer au moins 60 % de l’argent, et que l’on discute ainsi matière par matière, cela devient intéressant économiquement. Et cela permet notamment de faire en sorte que la France soit en avance sur la chaîne de valeur de recyclage des panneaux. Nous avons un éco-organisme et des industriels qui ont cette stratégie.

Est-ce que la réglementation va dans ce sens ?

La réglementation européenne concernant les batteries, adoptée il y a quelques mois, va dans ce sens. Et ce sera aussi le cas, je l’espère, pour le photovoltaïque, dans le cadre de la refonte du Règlement sur les déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE), annoncée pour 2024.

Adopté le 10/07/2023, le Règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux batteries et aux déchets de batteries prévoit notamment :

• un objectif de valorisation du lithium à partir des déchets de batteries de 50 % d’ici à la fin de 2027 et de 80 % d’ici à la fin de 2031 ;

• des niveaux minimaux obligatoires de contenu recyclé pour les batteries industrielles, les batteries SLI et les batteries de véhicules électriques. Ces niveaux sont initialement fixés à 16 % pour le cobalt, à 85 % pour le plomb, à 6 % pour le lithium et à 6 % pour le nickel. Les batteries devront être accompagnées d’une documentation sur le contenu recyclé.

Quelles sont les briques technologiques et organisationnelles qui manquent encore dans l’écosystème ?

Il y a une question importante d’adaptation à l’évolution des volumes, afin que l’on ne soit ni trop lents ni trop rapides face aux flux. La France n’est pas un pays avec de gros volumes, contrairement à l’Allemagne, qui aura donc un avantage compétitif. C’est pourquoi de nombreuses entreprises françaises s’installent en Allemagne.

Il y a aussi beaucoup d’améliorations techniques à venir, par exemple pour séparer l’antimoine du verre et faciliter ainsi la réutilisation de ce dernier, ou encore pour démocratiser la récupération de l’argent.

Structurer la filière du réemploi »

Enfin, il faut structurer la filière du réemploi. Dans les 3 prochains mois, nous allons lancer un appel à projets sur le réemploi et la réutilisation, doté de 3 M€ pour les 3 prochaines années. Nous menons une réflexion ces dernières années, pour définir les grands critères permettant de recertifier les panneaux, en matière de sécurité, de durabilité et de puissance. Nous lançons sous peu un label, et nous pensons qu’il y aura, d’ici quelques années, un standard.

Vous menez votre action via des appels d’offres ?

Nous sommes l’unique organisme habilité à collecter et à recycler les panneaux photovoltaïques, mais nous n’avons pas le droit d’être opérateurs, puisque nous sommes en situation de monopole. Nous lançons donc des appels d’offres pour trouver des prestataires pour la logistique, le réemploi, le recyclage.

Nous faisons aussi du plaidoyer. Nous signalons par exemple les cas dont nous avons connaissance d’opérateurs qui rachètent en masse des panneaux solaires usagés pour les envoyer à l’étranger à bas prix, sans avoir vérifié qu’ils marchent ou qu’ils ne sont pas dangereux, ni qu’ils seront in fine recyclés. Environ 40 % du flux est capté par ces acteurs, ce sont de gros volumes. Mais ce n’est pour l’instant pas interdit.

Trois Français sur quatre savent que les panneaux sont recyclables »

Nous menons également des actions de communication pour faire savoir que les panneaux sont recyclables et recyclés. Il y a un enjeu fort d’acceptabilité de ces énergies, il faut montrer que nous sommes exemplaires. Les baromètres de l’opinion sur ce sujet, que l’on publie depuis 2021, montrent que nous progressons. Ainsi, selon le dernier en date publié le 15/03/2024, trois Français sur quatre assurent que les panneaux sont recyclables (78 %, +5 points par rapport à 2023).

Enfin, nous sommes très sollicités par des industriels sur l’écoconception de leurs produits.

De quoi s’agit-il ?

Les industriels cherchent à faire des produits plus recyclables. Toutefois, c’est une question complexe, et le recyclage n’est pas l’alpha et l’oméga.

En effet, pour être plus facilement recyclables les panneaux pourraient par exemple être assemblés sans colle à base d’éthylène-acétate de vinyle (EVA). Dans ce cas-là, ils auraient une durée de vie moindre. Par ailleurs, pour séparer l'EVA éthylène-acétate de vinyle on peut utiliser des procédés thermiques, mais cela crée des fumées fluorées toxiques en raison de la présence de fluor dans les panneaux ; si on les produit sans fluor, les feuilles de support se craquellent plus vite… Mais vu les progrès des panneaux en matière de rendement au cours du temps, est-ce intéressant d’avoir une durabilité la plus longue possible ?

Dès que l’on touche un aspect, de multiples questions se posent. Il faut un équilibrage permanent.

Nicolas Defrenne


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Parcours

Soren
Directeur général
PV Cycle
Country Manager France
Ceres
Administrateur délégué
Ernst & Young (EY)
Auditeur

Établissement & diplôme

Tsinghua University
Chinois
Sciences Po Paris (IEP Paris)
Master
The George Washington University
Affaires internationales

Fiche n° 51369, créée le 16/04/2024 à 17:55 - MàJ le 17/04/2024 à 15:37

Soren

Soren est l’éco-organisme agréé par les pouvoirs publics pour la collecte et le traitement des panneaux photovoltaïques usagés en France.
Création : 2014, sous le nom initial de PV Cycle France.
- Détenu par 9 entités (société, syndicat, association), toutes actives dans la filière photovoltaïque. Sa gouvernance est assurée par un conseil d’administration et un comité des parties prenantes.
• Missions  :
- Rappeler aux fabricants et metteurs sur le marché l’obligation de travailler en collaboration avec l’éco-organisme au recyclage des panneaux ;
- Collecter tous les panneaux photovoltaïques usagés, en métropole et en Outre-mer ;
- Mettre en œuvre la filière de traitement des panneaux photovoltaïques usagés ;
- Créer et animer un écosystème de circularité des moyens de production d’énergie : soutenir les projets en R&D, innovation, éco-conception, et rassembler et valoriser les acteurs de la filière et de circularité ;
- Sensibiliser, éduquer et informer les professionnels du photovoltaïque comme les consommateurs à la gestion maîtrisée des équipements usagés.
Chiffre d’affaires : 9,54 M€ (2023)
Chiffres clés (2023) :
- 461 adhérents ;
- 276 points d’apport volontaires ;
- 5207 tonnes de panneaux photovoltaïques usagés collectés
Directeur général : Nicolas Defrenne
Tél. : 01 83 75 77 00



Catégorie : Divers privé


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Fiche n° 15596, créée le 16/04/2024 à 17:32 - MàJ le 06/06/2024 à 08:55

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Nicolas Defrenne, directeur général de Soren - ©  Soren